vendredi 24 avril 2015

"Mémoire de yoga n°10"


LA VOIX

Tendez l'oreille à ce chapitre nouveau, la voix mérite qu'on lui prête une oreille attentive. On ne parle pas assez de la voix, aussi voi(x)-là la voix.

A la naissance, le petit d'homme a toutes les capacités techniques et psychologiques pour émettre des sons couvrant de 4 à 5 octaves, bien que le larynx ne se mette en place, pour le garçon comme pour la fille, qu'au moment de la puberté. Sorti de la densité de l'eau, de la chaleur du liquide amniotique, il va se saisir des muscles de la phonation pour se faire entendre. La mère va favoriser cette expression, utilisant elle aussi sa voix "du corps".

La boucle de communication s'établit alors, et s'installe, durant une période qui va conduire l'enfant jusqu'au stade pré-verbal. Dans le même temps, le développement psycho-moteur va le conduire vers la position verticale, avec toutes les hésitations corporelles liées au déséquilibre. Au plan du langage, les premiers mots apparaissent et c'est alors que le seuil de tolérance auditif des parents va diminuer. Car, dès lors que l'enfant acquiert la position verticale, qu'il manipule les mots du langage pré-verbal, les attitudes des parents vont aller à l'encontre de la poursuite de ces perceptions. Ainsi, le prix à payer pour notre évolution, et notre maturation, est de nous entendre dire : "Maintenant que tu marches, ne traînes plus par terre", "Maintenant que tu parles, ne cries plus".

"Sois vertical et ne cries plus" : voilà comment des 5 octaves prometteuses, on régresse à une octave (registre d'un homme moyen non entraîné au chant).
Une octave correspond à une gamme complète :
Do  - Ré - Mi - Fa - Sol - La - Si - Do

Et c'est alors que la voix, qui a été le lien entre l'organique et l'organisation, entre le corps biologique et le corps de la langue, voici donc que la voix est investie de cette fonction qui devient unique, faisant de l'enfant un "être de langage" linéaire, une "tête" quantitative, au détriment du corps biologique, de la "voix du corps".
Le cri, la voix du jeu, l'interpellation sonore puissante ne sera plus autorisée que dans la cour de récréation, de re-création, ou de régression.
Adulte, nous aurons encore cette perception inconsciente que sensation et mouvement sont réciproquement liés, et qu'ils constituent l'articulation intérieure du dynamisme vital : le souffle, le cri, le geste, sont des mouvements anarchiques répondant aux sollicitations du monde.
Ainsi, comme le dit "Grotowsky" : "Libérer sa voix, ce n'est pas travailler avec l'appareil vocal au sens où il faudrait fixer son attention sur le travail vocal, au contraire, il faut travailler comme si le corps chantait, comme si le corps parlait.
Notre voix devient alors notre "carte de visite". Créant un espace sonore repérable, reconnaissable, elle va permettre à l'autre de nous situer, de nous re-connaître. Elle nous dévoilera également, selon qu'elle laissera transparaître nos émotions, nos inhibitions, nos craintes. La boule dans la gorge, la voix qui se veut douce afin de nous séduire plus facilement, ou la voix tonitruante qui occupera l'espace de communication, sans laisser à l'autre une place sonore ...

Nous voilà encore dans notre voix ... Celle que l'on utilise pour se faire entendre et comprendre de notre environnement. En sortir, dépasser les limites, voir au delà d'elle, comment nous sommes "faits" vocalement, retrouver des voix dites "archaïques", retrouver la sensation qui nous fait prendre conscience que c'est notre corps qui porte cette voix, et qu'à être mal dans son corps, on est forcément "mal dans sa voix", trouver d'autre timbres, d'autres sonorités, d'autres émotions, découvrir ce qui est, ou a été caché, retrouver son identité ... Voilà quelques pistes de travail.

Notre voix est faite de vibrations reçues dans notre tête et notre corps. C'est pour cela que le magnétophone, le plus sophistiqué soit-il, ne rend jamais ce que nous entendons habituellement au travers de notre propres résonateurs.




Après le Chat de Geluck, le "raisonateur", voilà :
Nasreddin, le fou qui vous rend sage (ou bien le contraire), un ajout épicé qui donne encore plus de goût et de couleurs à ce mémoire. Voici donc une histoire que je placerais bien volontiers juste après le sentencieux (chantencieux) "Sois vertical, ne cries pas !
"Du haut du minaret, Mulla Nasreddin lance l'appel à la prière. Puis, il se précipite hors de la mosquée, en courant à toutes jambes.- Où vas tu Mulla ? lui crie un fidèle.- C'est l'appel le plus puissant que j'ai jamais lancé, hurle Nasreddin. Je m'en vais aussi loin que possible pour voir jusqu'où on peut l'entendre."
Je me souviens avoir raconté cette blague initiatique sans réaction du public. Un silence total, glacial, me faisait de l'effroi dans l'dos !
Heureusement, j'ai été sauvé par un coup de gong (j'avais tout prévu). C'était la première d'une conterie musicale consacrée à Nasreddin. Sans mon coup de gong, je crois bien  que je serai resté sans voix !!!

"Haltère-écho" !
Cette autre histoire du Mulla illustre ce constat : notre voix nous paraît étrange, étrangère, modifiée lorsqu'on l'entend enregistrée par un magnétophone. La conduction du son par les os "haltère" l'écho de l'égo, ce qui donne du tonus et du poids à la voix. Avec notre écoute placée sur la conduction aérienne du son, notre organe vocal nous paraît plus muselé que musclé.
Alors après, faut pas s'étonner si Nasreddin en fait des tonnes :
"Nasreddin chante sous sa douche et découvre le charme de sa voix. Cela lui donne l'envie de remplacer le muezzin.
Il se rend au minaret et se met à chanter.
Les fidèles sont agacés.
Rapidement, il constate que son chant est vraiment désagréable à entendre et pense qu'on aurait dû installer une douche dans le minaret. Mais voilà, le monde est mal fait !"





La suite, la semaine prochaine, d'ici là : "bon chant, bon vent !"


vendredi 17 avril 2015

"Yogis amis unis pour l'avis"


Ciel ! Du courriel, mon amie Catherine A. prof de Yoga à Levallois-Perret (la voilà repérée), m'envoie ce texte yogique :
"Ma séance de yoga du corps que l'on A au corps que l'on EST" 
Le yoga part d'un point de vue assez pessimiste qui est que le corps est en plusieurs morceaux qu'il s'agit de réunir (yoga signifie "connexion" dans le Dictionnaire étymologique de la langue française, O. Bloch et W. Waerburg). 
C'est vrai que lorsqu'on s'allonge sur le tapis, on se sent parfois en mille morceaux : tel creux lombaire est plus ou moins douloureux, telle nuque contractée, une jambe paraît nettement plus courte, le bassin n'est pas symétrique, une omoplate est un peu déviée ... Tout est de guingois, reflet de notre désordre intérieur. Pas étonnant que nous soyons fatigués. Comment l'énergie pourrait-elle circuler dans un tel chaos ?
Alors, il suffit de ne rien faire (et c'est très difficile pour un occidental), de se poser, de se reposer et d'observer attentivement les cinq outils qui permettent la pratique du yoga : le corps, le sol, la gravité, la respiration, la conscience. 
Après ce premier moment de détente et d'intériorisation, la respiration va pouvoir se développer, de bas en haut, apportant son énergie à toute la colonne vertébrale.
Puis les postures (toujours sous le contrôle de la respiration, qui doit rester calme et régulière), vont aider le corps à s'étirer, se fléchir, se mettre en torsion, s'ouvrir et l'énergie qui était bloquée dans certaines articulations, va de mieux en mieux circuler, rassemblant le haut et le bas, la droite et la gauche, l'avant et l'arrière, l'intérieur et l'extérieur. 
Et quand le corps aura été bercé, roulé dans tous les sens, comme un galet dans la mer, il pourra enfin sentir son poids et demeurer en repos.
Après un temps de rotation de la conscience dans toutes les parties du corps, guidé par la voix de l'enseignant, l'adepte du yoga recueillera, avec émerveillement, le fruit de sa pratique (faite de lâcher-prise et de rigueur) : harmonie, vibration intérieure, présence du corps qu'il EST. 
Rien à voir avec ces compétitions qui se pratiquent aujourd'hui en Inde ou aux USA.




Lorsque Catherine en a ras le bol de vibrer yoga, qu'elle en a plein les guibolles de suivre le énième
stage plus meilleur bien que le précédent, elle va voir ailleurs si elle y est.
Elle marche bien, ses gambettes l'emmène loin. Dans les quatre peintures qui suivent, elle nous promène au Maroc. Avec son regard à l'affût et son instinct de survie, elle repère et se désaltère, c'est nécessaire dans ces endroits déserts. Elle se pose, dispose le matériel et les pinceaux s'en mêlent, en voici quatre "Cat" belles aquarelles :




Après Cat croque le Maroc, voici en réponse à l'e-miel goûteux d'une butineuse de vie, la version de Yann le yogi baroque et loufoque :

En ce qui me concerne, je me sens raide comme un bâton tordu. Morcelé ?
Pas vraiment, la raideur se niche un peu partout !
La pause yoga est nécessaire. Au fur et à mesure (dans le sens mesuré et musical), la séance va m'apporter ses bienfaits. Si je suis bien présent, je profiterai d'une heure de répit réparateur.
L'esprit, lui, est dispersé, il faut que j'le "plug" afin d'éviter le "bug" (le connecter au corps pour ne pas laisser place au bazar).

Revenir à la phrase de Nietzsche :
"Chaque homme cache en lui
un enfant qui veut jouer."
Se laisser aller, faire confiance à la voix du guide (pour la pratique en solo, idem avec sa petite voix intérieure) et en animal naïf, redevenir "un bleu", un humain qui a les pieds sur terre (humain, humus, humilité).
Les adultes sont des enfants qui se préoccupent des autres et agissent avec eux !


J'imagine, la longiligne Cat'rine reine féline en séance, un yogide dit "étirez-vous". A partir de là, son amour du voyage lui fait comprendre "et tirez-vous",
Cat quitte sa posture d'écoute, s'évade, divague et dans sa tête, part en cat'imini sans faire de bruit.
Une fois revenue de ses écarts, se rendant compte de son absence, écarlate, elle s'éclate en mille morceaux.
Du coup, son creux lombaire est douloureux, sa nuque contractée est à Honolulu, elle a des papous dans la tête, son foie qu'est pas droit et sa rate qui s'dilate !
Ah ! mon dieu qu'c'est en béton ...

Je plaisante (le "cat-lembour" est si facile) mais on peut remplacer Cat la discrète par Yann le distrait.
Revenons donc aux conséquences de l'absence (au cours ou pendant la séance).
Il vaut mieux être régulier ... avec soi-même car si on ne fait rien de durable, l'absence de pratique rend la vie duraille (surtout pour un type de mon genre avec Miss Parkinson à l'affût).
Alors, hélas ! le temps passe, tasse, l'humilité laisse place à l'humidité et tu finis par faire un constat de dégât des os, des tendons, des tensions ...
Bref, tu rouilles et tu dérouilles. Et comme dit l'ami yogi Henri :
- Y faudrait mettre de l'huile d'olive dans les articulations.


Ce yogi de bureau est en train de se noyer dans ses contradictions, il va finir par boire la tasse vide et écrire comme un pied !

Cat'ring nous donne ses cinq outils (le corps, le sol, la gravité, la respiration et la conscience), mots qui sonnent si bien à mes oreilles !
Ils s'entendent à merveille avec ces quelques conseils.
Résumons l'esprit du yogi, il lui faut aborder les postures avec :
  • L'engagement physique et mental juste. Au niveau volonté, préférer "volontiers" à "violenter" et s'efforcer (à se faire du bien) à se forcer (et se donner bien du mal) !
  • La conscience de la respiration et son contrôle, afin de ne pas créer de stress respiratoire, mais plutôt de la caresse soufflée.
  • L'écoute du corps, l'attention à soi, l'accueil et la cueillette des sensations.
  • La coordination du geste et du souffle, avec pour tempo la douceur et la grâce de la lenteur sensorielle. Prendre le temps de ne pas aller trop vite et synchroniser apportent rythme, harmonie et fluidité !
  • La vigilance constante de la posture (avant, pendant et après), à notre époque de zapping (c'est contraignant et contrariant pour beaucoup de gens d'être présent) mais saperlipopette ! qu'il est plaisant d'être présent.
  • Du temps d'observation pour accueillir les effets de la posture.
Voilà, amie yogini, n'hésite pas à m'envoyer du vécu de prof de yoga.
Un peu en retard, je te souhaite un joyeux "amieversaire" !!!
Allez, caresses et bises à l'oeil et à la semaine prochaine pour de nouvelles bonnes vibrations !






vendredi 10 avril 2015

"De Nietzsche à Hitchcock"


"Chaque homme cache en lui
un enfant qui veut jouer."
Nietzsche

- Nietzsche !
- Athée souhait ! Ah ! toi, t'as le nez pris.
- Oui, je suis "pris au nez" de tout ce qui encombre mon esprit.
Ma vie et ma vue, c'est l'bazar, j'me sens bizarre. Le vent m'a frappé, je suis "embrhumé". Le vent, c'est mon esprit agité.
- Il paraît qu'en Allemagne, les gens qui n'aiment pas Nietzsche, qui ne peuvent pas le sentir, l'éternuent !
- "Nietzsche" ! C'est peut-être l'équivalent violent de notre "A ... tchoum" !
Comme je ne sais pas ce que ce Mr Tchoum nous a fait pour nous sortir par les trous de nez, j'imagine une version positive.
Je visualise plutôt un djinn tonique, aux mimiques comiques, qui sort, tel un émouvant nouveau né, afin de nous rappeler que se cache en nous un enfant qui veut jouer.
- En fait, les personnes qui s'évertuent à éternuer "Nietzsche !",sont des gens qui ne veulent pas reconnaître en eux, le gamin qui veut s'amuser. Du coup, ils ont le moutard qui leur monte au nez !
 - Lorsque l'on n'a que mépris pour le genre "hume-ain", on a le nez pris et donc, on ne peut pas avoir le nez creux et reconnaître l'esprit riche et raffi-nez d'un Friedrich Nietzsche !


Pour Nietzsche, le corps est plus spirituel que l'esprit lui-même.
A spirituel, spirituel et demi, semble dire ce slogan d'enfant de choeur :
"God is dead" (Nietzsche) !
"God is Dad" (Jesus) !!
"Nietzsche is dead (God ) !!!
Et en français (lu dans la bible), on pourrait rage-où t'es ?
"Les narines me brûlent" dit Dieu en colère.


"Gestuologie"
Sur le corps on peut lire aussi (ce qui est bien pratique lorsqu'on est au café et qu'on a fini son livre, il suffit de regarder autour de soi), en plus, il nous apprend des choses :
"Il y a plus de savoir dans ton corps que dans la philosophie la plus profonde."
Nietzsche
De son corps spirituel, Miller en rit !
Lorsque la compagne migraineuse d'Henri Miller (obsédé textuel et sexuel), le voyait sortir précipitamment de l'appartement, une bouteille à la main, peut-être lui disait-elle :
- Où cours-tu si vite ?
- Je fonce à mon cours de philo, suis en retard.
- Et comment elle s'appelle celle à qui tu fais la cour de filou ?
Et là, imparable, Miller, du tac au tact, répondait :
"Notre corps physique possède une sagesse qui fait défaut à celui qui l'habite."
- Et ça, c'est pas d'la philo peut-être ?
- Et qu'est-ce t'a dit à la fin, à celui qui la ...
- A celui qui a l'habitude de la ...
- Biture tu voulais dire ?

Que signifient nos gestes ?
La femme délaissée et pas dupe du peu de patience de l'amant Henri, qui s'adressait à lui, ne devait sûrement pas être en train de :
Se frotter les yeux (incrédulité).
Se caresser les mâchoires (réfléchir avant de se décider).
Ou d'avoir :
Le regard dirigé vers le sol (incrédulité face à ce que l'on entend) et :
Les paumes tournées vers le haut (innocence).


Code de conduite "Les modificateurs de la mimique faciale" (lu dans le livre ci-dessus) :
"Le clin d'œil, qui précède ou apparaît simultanément avec les paroles : il indique que ce qu'il accompagne ne doit pas être pris au sérieux.
"Écoutez, c'était vraiment délicieux et en plus, j'ai tellement mangé que je pourrais me passer de repas (clin d'œil) ... pendant au moins un mois !"
Le criminel se reconnaît par son fasciés crime. Même pour ceux qui s'escriment à effacer les traces de leur méfait, c'est un coup d'épée dans l'eau (voir Maître Hitchcock et son film "l'escrime était presque parfait").
L'inspecteur (qui n'oublie jamais d'inspecter avec respect les suspects) et le commissaire (qui s'y connaît en commissures de lèvres, qui lui ont susurré et suggéré tant de malfrats) savent combien le corps parle.
Même le si subtil souffle est éloquent :
" ... Il accompagne la réponse à une question directe. Si j'ai besoin de souffler, je le fais normalement avant de répondre.
En revanche, si je me trouve en rupture de cohérence interne, le souffle intervient après ma réponse, comme si je voulais inconsciemment, par mon expiration, décharger ma conscience de ce poids."

Les muscles faciaux traduisent des sentiments, des comportements et trahissent des égarements de garnements :
Le "Triangulaire"  : abaisse les commissures des lèvres.
Pessimisme, sens de la catastrophe.
Affaire facile pour le commissaire, ce voleur loser est sûr de rater son coup.

De même pour cet autre type "cata-tête à claque" :
La "Houpe" élève le menton et la lèvre inférieure.
Doute de soi, indécision.
Pour lui, à tous les coups, ça l'houpe !!

Un autre profil, celui là, c'est son orgueil qui le perdra.
Le "Canin", tire vers le haut la commissure de la lèvre inférieure,  crée un gonflement à côté de la commissure.
Orgueil, fierté, ascendant sur autrui.
Cette canaille à canin, ce malin qui a du chien n'est pas prêt de se dégonfler. C'est un coriace cet As des as !!!
Soyons à l'écoute de son souffle, alors le boursouflé s'essoufflera !


Le yogi, ayant l'habitude de pratiquer la posture du cadavre, est le plus difficile à dévisager et à envisager comme coupable, surtout s'il a commis un meurtre après méditation.
Question expressivité, il sait faire le mort, tout est intériorisé, rien ne transparaît !
Son visage est un masque et il en maîtrise les muscles.

Adichats !
A bientôt !

Crédits dessin : Scott McCloud (anatomie nez et visage, "Faire de la bande dessinée") et Duc (Le visage impassible, "L'art de la B.D").

vendredi 3 avril 2015

"Muséchothérapie"


"La musique exerce un grand pouvoir."
"La musique est une nécessité pour les parkinsoniens."
Le neurologue Oliver Sacks

Rituel et ritournelle !
Il y a longtemps de cela, au temps ancien où je commençais mon aventure "Éveil Musical" (c'est à dire en 1990), déjà passionné par les harmoniques du son, j'inventais une courte histoire destinée à mettre en valeur mes dernières acquisitions : des bols chantants. Bols qui non seulement chantent, mais en plus, nous regardent :




L'histoire, LA voi-SI, LA voi-LA :

Un jour, un meynierstrel distrait fait une fausse note lors d'un concert organisé par l'association "Des notes justes". qui, s'appuyant sur un règlement intérieur austère, fait régner la terreur de l'erreur. La crainte de la dissonance abrutit et aboutit à une aberration pénale pénible.
Ainsi, tout joueur de fausse note est considéré comme un mécréant à condamner, un damné Faustien mal noté, un fou qui fait du faux. Le juge des notes considère que celui qui rate ses notes, irrite et déroute et met vite le doute au sein du groupe.
Par conséquent, les fausses notes, s'il ose en faire hi hi ! ra (en enfer !).
Le troubadour troublé prend ses jambes à son cou, va se réfugier au pays des "why note, c'est juste ... une note" et se met à l'abri dans une caverne qu'il le rend baba.
- A la bonne heure ! se dit-il en jouant avec le divin son aigu et cristallin des stalactites et avec les stalagmites au son plus grave et plus minéral !

Cette grotte était riche en résonances, elle se trouvait en pays d'Algéguéri, pays des algépluriens. Peuple qui se soigne au son caverneux et joyeux des si chics stalactites énergétiques et des stalag-mythes magiques qui ont tant de sages histoires à nous conter..
Ces espèces de gnawas (musiciens médecins du pays voisin, à l'époque le baroque Maroc n'roll) organisent vivement et dans un court délai, un concert de Maqsim Leforestier (nom de scène donné à l'artiste pour l'occasion).
Le concert "insoliste", insolent et déconcertant, va faire un barouf d'enfer, tout un ramdam nocturne.
Lorsque l'on va se coucher après avoir joué un bon moment avec des stalactites galactiques et des stalagmites moites, on s'endort en faisant des rêves d'allumeur de rêves berbères, on voit des fées et des Fellags, des effets et des gags qui enchantent, chantent et dansent dans ce lieu riche en vibrations où se rencontre écho et "réverbère à sons" !!!
Bref dans cette histoire (contée autrement pour les drolles), je démontrais que les grottes aux sonorités sympathiques étaient de thérapeutiques lieux de lien et de lumière !




Quel écho ainsi danse !
Et v'la t'y pas que je découvre (dans l'excellente émission de France-Inter "Sur les épaules de Darwin" de J.C Ameisen) qu'il existe des archéologues acoustiques (Rupert Hill et son groupe de chercheurs musiciens "Le chant des grottes"). Ceux-ci ont comme perspectives de déterminer les empreintes digitales sonores des cavernes.
Les fresques les plus anciennes de certaines grottes (du nord de l'Espagne) ont été peintes dans le noir. Dans ces conditions, pour l'artiste, le guide, le repère, c'est l'écho !
Ces archéologues ont constaté que les parois sont toujours peintes à l'endroit de la grotte où il y a le plus d'écho, de résonance et de réverbération.
Pascal Quignard en parle si bien :
"Dans les cavernes d'écho, les parois sont des résonateurs nocturnes." 
"L'écho est la voix de l'invisible."
Ainsi, il y a fort longtemps, dans l'obscurité, des hommes ont créée des images sonores, des paysages de sons.



A l'extérieur, la nature les a inspiré, ils ont inventé des instruments de musique :
Flûtes d'os troués, rhombes vrombissants tournoyants au dessus des têtes, racleurs plaintifs de bois de rennes, galets frappés, cor-nes d'auroch (ou de bison, de bouquetin) soufflées, peau animale tendue frappée comme un tambour, trompette de bouleau, flûte de roseau, de sureau, phalanges trouées de rennes  ...




Vu sur le site "Hominidé.com", c'est une flûte en os de vautour qui vaut le détour. Trouvée en Allemagne, c'est le plus vieux des instruments (daté carbone 14 de plus de 35000 ans) !

A l'intérieur, la nature crée elle-même, un décor sonore aquatique et extatique.
Avec tact, les stalactites, plic ! et leurs gouttelettes s'flaquent, plac ! se répandent et se répondent entre-elles, du tac au tac, ploc ! Dans mon histoire, je les comparaient à des lithophones.
"Les grottes du paléolithique sont des instruments de musique dont les parois sont ornées de peintures."
Pascal Quignard
Dans la caverne, les endroits pour D.J, sont des lieux de R.V pour rituel, C.Q.F.D !!!
Dans ces salons où l'on refait le monde en même temps que l'on s'refait une santé, on défend l'écho-se perdues et on pratique la "Muséchothérapie".
"Les parois colorées ont été choisies en fonction de leur qualités acoustiques."
Iégor Reznikov


"L'à racler", une valeur en os chez les hommes pré-hystériques :
- Tu m'énerves, tu vas prendre à racler et tu me fiche la paix, dit le père râleur, racleur mais non violent à son fils agité !

Ainsi tout lieu à écho est un temple, lieu d'intériorisation qui aère l'esprit, tralal'air.
L'arc sert à la chasse mais sert la musique aussi, tralal'art.
La corde vibrante de l'arc sonne comme un chant d'hirondelle qui jubile, tralal'or.
L'arc musical vocalise alors comme une lyre, tralalyre !!!
"Le mot 'harmonie', harmonia en grec
décrit la façon d'attacher les cordes pour les tendre."
Quignard
Et pour ça (tendre), prendre son temps, son tempo, prendre le temps de ne pas aller trop vite, s'allonger, s'étirer et pratiquer le yoga de Nietzsche :
"Nous écoutons la musique avec nos muscles."
L'âme zen d'Ameisen asticote "l'âme-son", pratique la posture du Poisson, suit les conseils de Platon tous les jours et Pâques le vendredi :
"La musique pénètre à l'intérieur du corps et s'empare de l'âme."
Les cris ... Non mais, tentant ce que je vois !
"Écrire, c'est entendre la voix perdue." P. Quignard
Ben, écoute et fait du silence ...
"Le silence n'est  que l'ombre que le langage porte, comme la conscience n'est que la chambre d'écho du langage dans le résonateur de l'âme."
Quignard
Voilà, on nous supprime une heure et je n'ai plus mes repères. Je ne sais plus dans quelle épique époque opaque on vit !!!
Bon, à bientôt.

Crédit photo des Bols Chantants : "Magiedubouddha;com".