jeudi 11 janvier 2018

"Mémoire de Yoga n°30"


La musique de l'Inde (suite).
... La pensée indienne reconnaît en chaque note une énergie cosmique qui lui est propre. Pendant l'Alap, le musicien s'exerce à prendre conscience des notes du mode (Mode = Raga : humeur, couleur, passion).
Au bout d'un moment, l'échelle du mode devient une image mentale : c'est la perception du raga. A cet instant, les intervalles prennent une extrême précision, une signification émotionnelle définie. Il devient presque impossible au musicien de détonner, de jouer ou chanter une note qui ne fasse pas partie du mode. Ses auditeurs sont également saisis par le sentiment du raga.
Selon des règles de composition précises, le musicien commence alors à errer sur l'échelle du mode, l'entourant d'arabesques, de motifs mélodiques, mais sans jamais écarter sa concentration mentale de l'échelle du mode. C'est pourquoi toute mélodie fixe est impossible, car elle crée une diversion dans la concentration sur le mode, qui nuit à  la précision et au sens des intervalles.
La technique d'improvisation dans le raga a pour effet de recentrer l'individu. La qualité de la méditation musicale du musicien se révèle dans la manière de développer son improvisation et d'amener ainsi son auditoire à travers un dédale d'images sonores à une évidence du sens général, dans lequel chacun se meut au fond de lui-même comme dans un monde connu et portant sans cesse renouvelé.

L'improvisation, source créatrice, devient alors le vecteur spirituel nécessaire à toute découverte et connaissance de soi-même.
Chaque raga est associé à une heure du jour ou de la nuit à laquelle son chant est approprié, et quelques-uns correspondent à des saisons particulières ou provoquent des effets magiques précis.
C'est justement à cause de cet élément de magie et de l'association des ragas avec le rituel rythmique des jours et des saisons, que la netteté des lignes n'en doit pas être voilée par la modulation; ce que l'on exprime en disant que "chanter hors du raga", c'est rompre les membres des anges musicaux.
On raconte une légende caractéristique sur le prophète Narada, alors qu'il apprenait encore la musique. Il croyait y être passé maître, mais la Toute-sagesse, Vischnou, pour abaisser son orgueil, lui découvrit dans le monde des Dieux un vaste édifice où gisaient des hommes et des femmes pleurant leurs bras et leurs jambes brisés.
C'était les ragas et les raginis, et il dirent qu'un certain Sage du nom de Narada, musicien ignorant et exécutant maladroit, les avaient chantés de travers, aussi leurs traits étaient-ils déformés et leurs membres mutilés, et tant qu'ils ne seraient pas chantés comme il faut, il n'y avait point de guérison pour eux.
Alors, Narada s'humilia et, s'agenouillant devant Vischnou, implora la grâce d'apprendre l'art de la musique de façon plus parfaite et, avec le temps, il devint le grand prêtre musicien des Dieux.
Aux modes sont souvent associés des poèmes, cela donne ceci :
"Lalita, jeune et belle, porte un collier de 7 sortes de fleurs. Ses yeux sont allongés comme les pétales du lotus. Vêtue encore comme pour un rendez-vous d'amour, elle soupire à l'aurore, vaincue par le destin."
"Lalita" (mode des premières heures du jour).






Ci dessus : Raga Lalita.
A partir du quinzième siècle, des artistes ont illustré ces poèmes par des séries de peintures intitulées "Ragamala" ("guirlande de raga"), représentant les différents ragas et leurs aspects.

Eh oui Louis, joue et jouie des jolies joies du jeu de l'ouie !
En fait, c'est toujours la même chanson, le même refrain, l'identique rengaine et le similaire raga qui reviennent : trouver le geste juste !
Devenir simple, souple, sincère, avoir un but de joueur de luth et rechercher l'harmonie, rassembler des notes qui s'aiment, qui s'entendent bien, éviter de réunir des notes qui sèment la discorde (et pas seulement chez les joueurs de luth à dix cordes).
Raga santé :
Y'a des ragas pour tout, pour les tracas, les bobos des babas gagas, les actes cra-cra des baba-yaga (ogresses dévoreuses d'enfants), les défis des profs de yoga dont la dopa est bouffée par une baba-yoga rabat-joie ...

P.S : ces derniers temps, j'ai publié moins souvent (trois fois par mois au lieu de quatre), c'est de la faute à ma fainéantise. Je ne joue pas assez de raga "Madhuvanti", le raga ayurvédique qui convient à un gars comme moi.
Namasté et bonne santé pour toute l'année !




Tiens, voilà Madhuvanti, mon médoc anti-parkinson qui m'sonne :
- Il est 18 heures, c'est le moment de jouer mon raga.
- J'y vais de ce pas, paisible, bien déterminé à ne pas me chercher des poux mais plutôt motivé à trouver la paix !



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